Chaque été, la même question hante de nombreux parents d’enfants DYS (dyslexiques, dysorthographiques, dyspraxiques, dysphasiques) : faut-il faire travailler son enfant pendant les vacances scolaires ? Après une année souvent éprouvante, faut-il imposer des devoirs de vacances pour ne pas qu’il « perde ses acquis » ? Ou au contraire relâcher complètement la pression ? D’un côté, on craint que deux mois sans école n’accentuent le retard accumulé durant l’année. De l’autre, on voit bien que nos enfants DYS ont besoin de souffler. Alors, travaux d’été ou lâcher-prise total ? Comme souvent, la meilleure voie se trouve dans un équilibre bienveillant entre les deux.
Le besoin de repos des enfants DYS
On ne le dira jamais assez : les enfants présentant des troubles DYS fournissent des efforts surhumains pendant l’année scolairelesadultesdedemain.com. Lire, écrire, se concentrer en classe leur demande une énergie considérable, engendrant fatigue et stress. Quand sonne la fin de l’année, ces élèves et leurs parents sont souvent épuisés. Les vacances d’été apparaissent alors comme une bouffée d’oxygène nécessaire pour recharger les batteries. « Les vacances sont les vacances et le mot devoir est à bannir » déclare ainsi une maman d’enfant dyslexique. Après une année difficile, elle a décidé de ranger les cahiers au placard tout l’été, au grand bonheur de sa fille. Le résultat ? « Aucune différence à la rentrée de septembre », avoue-t-elle, si ce n’est une enfant plus détendue et confiante. En effet, ne plus parler d’école pendant deux mois peut faire un bien fou à tout le monde : l’enfant retrouve une enfance “normale” sans exercices ni notes, et le parent sort de son rôle d’enseignant pour redevenir simplement papa ou maman. Cette pause mentale est précieuse pour aborder la nouvelle année scolaire avec sérénité.
Cela signifie-t-il qu’il faut tirer un trait sur tout apprentissage pendant l’été ? Pas forcément. Chaque enfant est unique : certains enfants DYS aiment apprendre, même en juillet, et risquent de s’ennuyer sans aucune stimulation. D’autres, au contraire, sont saturés et ont besoin d’une vraie coupure. À vous, parents, de trouver la formule gagnante pour votre enfant. L’idée n’est pas de « faire l’école à la maison » sur la plage, mais plutôt de maintenir un lien léger avec les apprentissages, sans en avoir l’air. En un mot : oui, on peut proposer quelques activités éducatives pendant l’été, mais jamais au détriment du bien-être et du repos.
Des révisions… sans en avoir l’air !
Le secret, c’est de rendre les révisions ludiques et informelles. Hors de question de dégainer la fiche de lecture ou la dictée au petit-déjeuner ! À la place, on profite des mille occasions qu’offrent les vacances pour apprendre autrement. Comme le souligne une blogueuse parentale, « il existe de nombreuses façons de réviser : lire un livre pour faire du français, faire un gâteau pour réviser les maths… Aller à la piscine ou jouer dehors, c’est du sport… et faire des jeux de société, c’est tout de même plus sympa » heleneh71.e-monsite.com. Bref, la vie quotidienne regorge d’opportunités éducatives insoupçonnées. Voici quelques exemples concrets :
Lecture plaisir au programme : Si votre enfant a des difficultés en lecture, profitez de l’été pour lui donner envie de lire plutôt que de lui imposer des textes. Emmenez-le choisir un roman jeunesse adapté (il existe des collections spéciales « Dys » à la mise en page aérée comme la collection j’apprend à lire de Hachette ), des BD, des magazines sur ses centres d’intérêt (sports, animaux, Minecraft…). Même lire les panneaux d’orientation lors d’une balade en forêt ou les descriptions au zoo peut servir d’exercice de lecture sans en avoir l’air. Le soir, pourquoi ne pas instaurer un petit rituel lecture ensemble ? Sous la tente avec une lampe de poche, ou en mode détente dans le hamac, ces moments renforceront sa fluidité de lecture tout en créant de jolis souvenirs d’été.

- Écrire pour raconter ses vacances : L’écriture est souvent un cauchemar pendant l’année scolaire pour un enfant DYS, alors en vacances, on la dédramatise. Proposez-lui de tenir un carnet de voyage ou un journal de bord amusant. Chaque jour (ou chaque semaine), il peut coller une photo, un ticket de musée, un coquillage, et écrire une phrase ou deux dessous pour expliquer ce souvenir. Pas besoin de longs textes : une légende de quelques mots suffit. L’orthographe n’est pas parfaite ? Pas grave ! L’important est qu’il manie le stylo sans pression, pour le plaisir de raconter. Autre idée : envoyer des cartes postales aux copains ou à la famille. Le format est court, le ton libre et joyeux, et écrire à Papi/Mamie motive bien plus que de remplir un cahier d’exercices. Votre enfant sera fier de coller le timbre et de poster lui-même sa carte. Il s’exerce ainsi à écrire et structurer ses idées, tout en faisant plaisir à ses proches.
Calcul et logique au quotidien : Pas besoin de fiches de maths pour entretenir le calcul mental. Impliquez votre enfant dans des situations concrètes : calculer le budget de la fête foraine (combien coûte 3 tickets de manège plus une barbe à papa ?), mesurer les ingrédients d’une recette de crêpes (fractions et proportions, sans le dire), ou compter les kilomètres parcourus en vélo durant la semaine. Les jeux de dés et de cartes sont aussi nos alliés : jouer au Yam’s (Yahtzee) ou à des jeux de plateau où l’on lance deux dés ( comme le PERUDO ) oblige à additionner des points, sans même qu’il s’en rende compte. De nombreux jeux de société utilisent les nombres : par exemple, tenir la banque au Monopoly (en adaptant si besoin les règles pour simplifier les billets) ou jouer à des petits jeux de calcul mental sur smartphone durant un long trajet (il existe des applications ludiques de maths pour enfants). Tout cela fait travailler son cerveau en douceur.
En somme, on vise une pédagogie furtive, façon « manger des légumes cachés dans une purée ». Votre enfant révise un peu chaque jour, mais il a juste l’impression de s’amuser ou de participer à la vie de famille. Astucieux, non ?
Le cas des cahiers de vacances

Ah, le traditionnel cahier de vacances qui trône en tête de gondole chaque mois de juin… On a tous connu ça : on l’achète pleins de bonnes intentions, avec sa couverture colorée et ses promesses de réviser en s’amusant. Et puis… il finit souvent commencé à moitié, avec des pages remplies en diagonale entre deux baignades. Pour un enfant DYS, le cahier de vacances classique peut être doublement décourageant. Petits caractères, exercices en pagaille, consignes parfois ambiguës… Bref, de quoi le confronter à ses difficultés et miner sa confiance en soi. La bonne nouvelle, c’est que depuis quelques années il existe des cahiers de vacances adaptés DYS. Plusieurs éditeurs proposent des cahiers du CP à la 3ᵉ spécialement conçus pour les élèves dyslexiques ou autres troubles : police d’écriture sans empattement, mise en page aérée, leçons concises, etc. Si votre enfant a un profil plutôt « scolaire » et aime ce format, pourquoi pas essayer ? Certains enfants prennent plaisir à remplir ces cahiers, surtout s’ils sont valorisés pour leurs progrès. Veillez cependant à garder un œil critique : si un exercice le met en échec ou déclenche une crispation, on zappe sans scrupule. Le maître-mot doit rester « entraînement, pas épuisement ». N’hésitez pas à adapter les consignes, à faire certains exercices oralement au lieu d’écrire, ou à passer aux pages suivantes. Le cahier de vacances n’est qu’un outil parmi d’autres, certainement pas un juge de valeur.
Pour le rythme, la règle d’or est un peu chaque jour plutôt que beaucoup d’un coup. Inutile de prévoir 2 heures de « classe » tous les deux jours : mieux vaut 15-20 minutes quotidiennes, cinq jours sur sept, par exemple, et toujours de façon légère. Ainsi, l’enfant conserve l’habitude de mobiliser ses connaissances sans saturer. Et si un jour ça ne passe pas (fatigue, opposition, ras-le-bol), on raccourcit ou on reporte à plus tard ; rien n’est gravé dans le marbre. Pensez aussi à ménager des jours sans rien du tout (au moins un ou deux par semaine) où c’est 100% farniente. Le cerveau a besoin de repos pour consolider la mémoire : faire le vide, c’est aussi apprendre ! Les scientifiques parlent d’« apprentissage distribué » ou de l’effet espacement : revoir une notion plusieurs fois de manière espacée dans le temps ancre beaucoup mieux les connaissances qu’une session marathon. Donc pas de culpabilité les jours off : ils font partie intégrante de la stratégie.
Activités ludiques et créatives
L’été est le moment idéal pour sortir des cahiers et explorer d’autres formes d’apprentissage. Les enfants DYS excellent souvent dans des domaines moins scolaires : arts plastiques, musique, sport, bricolage… Profitez-en pour nourrir ces talents et booster leur estime d’eux-mêmes. Exploiter leurs talents est fondamental pour maintenir le plaisir d’apprendre. Par exemple :
- Votre enfant est fan de dessin ou de Lego ? Super, c’est de la géométrie et de la planification déguisées. Construire un château de sable élaboré, monter un cerf-volant, ou inventer une chorégraphie, ce sont autant d’activités qui développent sa motricité et sa coordination (utile pour un dyspraxique), son sens de l’observation, sa créativité… Toutes ces compétences dites transversales lui serviront aussi à l’école, indirectement.
- S’il aime la nature, proposez un petit projet comme créer un herbier ou un album photo des oiseaux observés en vacances. Il devra lire les noms des plantes, écrire des étiquettes, classer, tout en ayant l’impression de jouer au petit explorateur.
- Les jeux de société en famille sont une mine d’or (nous y reviendrons plus en détail dans un autre article du dossier). Ils permettent de travailler sans en avoir l’air la lecture (cartes à lire, plateaux), le calcul (dés, points, monnaie factice), l’attention et la mémoire… le tout en s’amusant ensemble. De nombreux orthophonistes utilisent d’ailleurs les jeux comme support pédagogique, en adaptant au besoin les règles pour éviter de mettre l’enfant en difficulté. Alors ne vous privez pas de quelques soirées Uno, Dobble ou Petits chevaux – quitte à aménager un peu la règle pour que tout le monde y trouve son compte. Par exemple, si les cartes « Chance » du Monopoly sont trop difficiles à lire pour votre enfant dyslexique, lisez-les à voix haute à sa place, ou simplifiez le texte. L’important est qu’il participe et prenne du plaisir, sans se sentir handicapé par la lecture.
Bienveillance et lâcher-prise
Au cœur de tout cela, il y a un ingrédient indispensable : la bienveillance. On ne le répétera jamais assez : nos enfants DYS ne sont ni paresseux ni moins intelligents, ils ont au contraire une persévérance et un courage extraordinaires. L’été n’est pas un deuxième round pour “rattraper tout le retard” à marche forcée. C’est un temps pour consolider quelques acquis en douceur, tout en permettant à l’enfant de vivre pleinement sa vie d’enfant. Sur le ponton d’un lac ou dans la cour chez Mamie, on a le droit de faire des bulles de savon sans penser aux bulletins ! Maintenez un climat positif : valorisez chaque petite activité faite (« Bravo, tu as lu toutes les pancartes du parcours aventure, je suis impressionné »), montrez-lui que vous avez confiance en ses capacités à progresser à son rythme. S’il rechigne un jour, ne le prenez pas comme une offense : peut-être est-il juste fatigué ou peu enclin à cette activité précise. Dans ce cas, on adapte, on change d’approche, ou on laisse tomber pour aujourd’hui. La flexibilité est votre meilleure alliée.
N’oublions pas non plus que les vacances sont aussi faites pour s’amuser en famille et créer des liens. Profitez de ces moments sans le rush du quotidien pour faire des choses ensemble qui élargissent les horizons de votre enfant. Visitez un musée ludique, allez voir un spectacle de marionnettes, observez les étoiles la nuit tombée… Ces expériences nourrissent sa curiosité et son ouverture d’esprit, ce qui l’aidera à l’école et au-delà. Apprendre, ce n’est pas seulement aligner des chiffres et des lettres, c’est aussi découvrir le monde. Et quoi de mieux que l’été pour cela ?
Conclusion
Alors, devoirs de vacances ou pas ? La réponse est résolument nuancée. Inutile de transformer la maison de vacances en salle de classe, mais un minimum de stimulation intellectuelle permet à l’enfant DYS de garder le fil de ses apprentissages. L’objectif est de préparer la rentrée sereinement, sans sacrifier la joie et le repos de l’été. Quelques minutes d’activité régulières par-ci par-là, beaucoup de jeu, énormément de détente – voilà la recette. Votre enfant a tout autant besoin de repos que de ne pas complètement oublier ce qu’il a appris : concilier les deux est possible, avec un soupçon d’organisation et une bonne dose de bonne humeur. En le faisant réviser autrement, vous lui montrez que apprendre peut être fun, même en tongs et en maillot de bain. Et qui sait, en septembre, il pourrait bien reprendre le chemin de l’école sans appréhension, fier de tout ce qu’il a découvert pendant l’été. En attendant, profitez à fond de ces vacances pour vous ressourcer ensemble : vous l’avez bien mérité ! 😎
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